Auteur : Norman SPINRAD
Titre original : He walks among us.
Titre français : Il est parmis nous
ISBN : 978-2-290-02126-2 J'ai Lu, Octobre 2010, traduction Sylvie Denis et Roland C. Wagner, pages 425 à 428
— Exact, soupira Dexter. Mais je n'ai jamais eu l'intention que cette connerie de guru venu du futur soit prise au sérieux !
— Vraiment pas ?
— Non, vraiment pas ! insista Dexter. Pour moi, l'émission devait transformer la conscience du public par le biais de l'humour. Je n'ai jamais voulu créer un culte de cinglés des vibrations et de cadets de l'espace qui prendraient Ralf au sérieux ! Pas plus que je n'ai jamais souhaité que Ralf se mette jouer ça sérieusement ! Croyez-moi, dans mon petit monde de science-fiction, j'ai vu bien trop de ces conneries !
Il s'interrompit, quelque peu décontenancé par sa véhémence soudaine, se calma en prenant une lente gorgée de sa margarita et soupesa du regard la femme en face de lui qui le soupesait également.
— Et vous, Amanda ? dit-il finalement. Dans votre petit monde d'astrologues à vedettes et de gurus zen ninjas pour les riches et les imbéciles, vous avez sûre ment eu quelques occasions d'observer ce qui se passe quand des vendeurs tombent accro à leur propre huile de serpent ?
Amanda Robin se contenta d'incliner la tête sur le côté et de la hocher imperceptiblement.
— C'est ça, n'est-ce pas... ? dit lentement Dexter, qui commençait à comprendre. Voilà le pourquoi de cette conversation.
Amanda saisit son couteau et sa fourchette, prit un morceau de rognon sur le grill, le posa dans son assiette et entreprit de le couper avec attention.
— Oui, marmonna-t-elle. Quelque chose comme ça.
Elle porta un morceau à sa bouche et le mâcha d'un air pensif.
— Quelque chose comme ça ? dit Dexter.
Amanda leva les yeux vers lui, nerveuse, comme
si elle cherchait à prendre un genre de décision. Puis elle haussa les épaules, remplit son verre à moitié vide et en lampa la moitié comme un gars de la
bande qui s'envoie cul sec un whisky suivi d'une bière.
— Et si nous ne nous servions pas du tout de Ralf ? dit-elle. Si une entité quelconque se servait de nous pour... pour se manifester dans le royaume de maya ?
— Une entité ?
Amanda parut un instant le regarder furtivement du coin de l'œil alors même qu'elle le fixait droit dans les yeux.
— Je ne m'imagine pas pouvoir vous persuader de prendre au sérieux un système conceptuel impliquant des avatars matériels de divinités transmatérielles...
C'était à présent au tour de Dexter d'avoir besoin d'une bonne gorgée de fortifiant liquide.
— D'une certaine manière, j'en doute, dit-il sèchement.
— Peut-être pourrais-je au moins vous vendre le concept de Zeitgeist ? suggéra Amanda.
— Peut-être... sur un plan métaphorique.
— Que diriez-vous d'un inconscient intemporel et collectif de l'espèce qui se manifesterait par moment dans notre conscience individuelle par le truchement des rêves et de l'inspiration créatrice...
— Qu'est-ce que ça...
— ... essayant désespérément de s'incarner pendant le pic de la crise de transformation de notre espèce, afin de nous sauver de notre connerie avant qu'il ne soit trop tard, et de nous permettre de franchir l'étape de notre...
— Hé, attendez une minute, c'est moi qui ai écrit ça ! s'écria Dexter. Enfin, euh, quelque chose comme ça... ajouta-t-il, mal à l'aise, conscient soudain de ce qu'il était en train de dire.
(…)
— Voilà la question, dit Amanda Robin. Le Ralf que nous voyons sur le petit écran est-il vraiment notre création ? Vous, moi et un comique qui n'a qu'une corde à son arc trouvé par Jimmy Balaban dans la Bortsch Belt ? Il est arrivé avec le gimmick de base, j'ai poli le numéro, et vous lui avez fourni un futur détaillé...
— Bien sûr !
— Alors, d'où tout ça est-il sorti ?
— Nous l'avons entièrement fabriqué.
— C'est sûr... nous l'avons entièrement fabriqué. Rien qu'avec nos idées démentes. Et d'où tirons-nous nos idées démentes ?
— Exact, soupira Dexter. Mais je n'ai jamais eu l'intention que cette connerie de guru venu du futur soit prise au sérieux !
— Vraiment pas ?
— Non, vraiment pas ! insista Dexter. Pour moi, l'émission devait transformer la conscience du public par le biais de l'humour. Je n'ai jamais voulu créer un culte de cinglés des vibrations et de cadets de l'espace qui prendraient Ralf au sérieux ! Pas plus que je n'ai jamais souhaité que Ralf se mette jouer ça sérieusement ! Croyez-moi, dans mon petit monde de science-fiction, j'ai vu bien trop de ces conneries !
Il s'interrompit, quelque peu décontenancé par sa véhémence soudaine, se calma en prenant une lente gorgée de sa margarita et soupesa du regard la femme en face de lui qui le soupesait également.
— Et vous, Amanda ? dit-il finalement. Dans votre petit monde d'astrologues à vedettes et de gurus zen ninjas pour les riches et les imbéciles, vous avez sûre ment eu quelques occasions d'observer ce qui se passe quand des vendeurs tombent accro à leur propre huile de serpent ?
Amanda Robin se contenta d'incliner la tête sur le côté et de la hocher imperceptiblement.
— C'est ça, n'est-ce pas... ? dit lentement Dexter, qui commençait à comprendre. Voilà le pourquoi de cette conversation.
Amanda saisit son couteau et sa fourchette, prit un morceau de rognon sur le grill, le posa dans son assiette et entreprit de le couper avec attention.
— Oui, marmonna-t-elle. Quelque chose comme ça.
Elle porta un morceau à sa bouche et le mâcha d'un air pensif.
— Quelque chose comme ça ? dit Dexter.
Amanda leva les yeux vers lui, nerveuse, comme
si elle cherchait à prendre un genre de décision. Puis elle haussa les épaules, remplit son verre à moitié vide et en lampa la moitié comme un gars de la
bande qui s'envoie cul sec un whisky suivi d'une bière.
— Et si nous ne nous servions pas du tout de Ralf ? dit-elle. Si une entité quelconque se servait de nous pour... pour se manifester dans le royaume de maya ?
— Une entité ?
Amanda parut un instant le regarder furtivement du coin de l'œil alors même qu'elle le fixait droit dans les yeux.
— Je ne m'imagine pas pouvoir vous persuader de prendre au sérieux un système conceptuel impliquant des avatars matériels de divinités transmatérielles...
C'était à présent au tour de Dexter d'avoir besoin d'une bonne gorgée de fortifiant liquide.
— D'une certaine manière, j'en doute, dit-il sèchement.
— Peut-être pourrais-je au moins vous vendre le concept de Zeitgeist ? suggéra Amanda.
— Peut-être... sur un plan métaphorique.
— Que diriez-vous d'un inconscient intemporel et collectif de l'espèce qui se manifesterait par moment dans notre conscience individuelle par le truchement des rêves et de l'inspiration créatrice...
— Qu'est-ce que ça...
— ... essayant désespérément de s'incarner pendant le pic de la crise de transformation de notre espèce, afin de nous sauver de notre connerie avant qu'il ne soit trop tard, et de nous permettre de franchir l'étape de notre...
— Hé, attendez une minute, c'est moi qui ai écrit ça ! s'écria Dexter. Enfin, euh, quelque chose comme ça... ajouta-t-il, mal à l'aise, conscient soudain de ce qu'il était en train de dire.
(…)
— Voilà la question, dit Amanda Robin. Le Ralf que nous voyons sur le petit écran est-il vraiment notre création ? Vous, moi et un comique qui n'a qu'une corde à son arc trouvé par Jimmy Balaban dans la Bortsch Belt ? Il est arrivé avec le gimmick de base, j'ai poli le numéro, et vous lui avez fourni un futur détaillé...
— Bien sûr !
— Alors, d'où tout ça est-il sorti ?
— Nous l'avons entièrement fabriqué.
— C'est sûr... nous l'avons entièrement fabriqué. Rien qu'avec nos idées démentes. Et d'où tirons-nous nos idées démentes ?
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